Enquête sur le taux d’absentéisme pour la fête de l’Aïd. Ou quand la « mixité sociale » et la gestion des réseaux d’éducation prioritaire tournent à l’islamophobie.


Avant les vacances d’avril, certaines écoles, collèges et lycées ont été destinataires d’un mail émanant des Correspondants « Police Sécurité Ecole – Toulouse-Rive Gauche », porteur d’une « demande des services de renseignement » de faire remonter « le pourcentage d’absentéisme […] lors de la fête de l’Aïd »

Participation à une fête religieuse musulmane, absentéisme et sécurité, un lien plus qu’étrange… Pas tant que ça quand on voit la politique du gouvernement.


Les missions officielles des Correspondants Police Sécurité Ecole sont « la sécurisation des établissements scolaires et le suivi de la délinquance ». En quoi cette demande est elle en lien avec la délinquance et la sécurité ? Elle fait suite « à la demande des services de renseignements ». En quoi cette donnée d’absentéisme concerne la police ?
A moins que ces gens fassent le lien entre la participation à une fête musulmane et la délinquance, à moins que pour eux, la participation à une fête musulmane pose un problème de sécurité…

N’en déplaise à l’inspectrice de l’éducation nationale qui a confirmé aux directeur-trices de sa circonscription qu’il fallait répondre à cette demande, les enseignant.es ne sont pas les relais des services de renseignement à l’encontre de leurs élèves !

Dans quel cadre s’effectue la demande faite aux enseignant.es ? Relève-t-elle d’une enquête, d’une procédure judiciaire ? Ou est-ce que, sous couvert d’une simple injonction soutenue par les inspecteurs et inspectrices de circonscriptions, la police en profite pour réaliser un recensement sur critères religieux ?

Il ne s’agit pas “d’absentéisme”.

Les élèves sont autorisés à s’absenter le jour de l’aïd comme c’est clairement écrit dans la Circulaire du 18 mai 2004 en application de la LOI n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics : “Des autorisations d’absence doivent pouvoir être accordées aux élèves pour les grandes fêtes religieuses qui ne coïncident pas avec un jour de congé et dont les dates sont rappelées chaque année par une instruction publiée au B.O” .

Nous voyons là une dérive islamophobe grave, une stigmatisation des élèves musulman-es et une atteinte à leur liberté de conscience. Bien évidemment, nous ne pouvons pas nous insurger sur le fait que cela ne soit pas demandé pour une fête chrétienne, toutes les fêtes chrétiennes étant des jours fériés ! Nous rappelons que la liberté de conscience est une liberté fondamentale au sens juridique du terme, garantie par de nombreux textes fondateurs.


Seuls certains établissements ont été destinataires de ce mail. Ou quand le projet dit de mixité sociale cache à peine le racisme.

En cherchant un peu, nous avons constaté que la grande majorité des établissements visés se situent dans une zone qui correspond aux quartiers des établissements REP / REP+ et aux établissements qui accueillent les élèves des deux collèges de Reynerie et Bellefontaine ayant fermés dans le cadre du projet dit de « mixité sociale ».

Déjà, nous apportions récemment un point vue bien différent du bilan que tire le conseil départemental de ce projet, contre lequel nous nous opposons depuis le début.

Dispositif « Mixité sociale » et fermeture des collèges Reynerie et Bellefontaine à Toulouse : réponse de Sud Education 31-65 au bilan du Conseil Départemental.

La demande des services de renseignement ainsi relayée, vise essentiellement les réseaux d’éducation prioritaire en cours de démantèlement sous couvert de « mixité sociale »…

Au regard des discours tenus depuis le début de ce projet et dans le dernier bilan du conseil départemental, force est de constater encore une fois la manière dont se décline une politique raciste dans les établissements scolaires.

Pour toutes ces raisons, nous attendons des explications quant à cette procédure et exigeons le retrait officiel de cette injonction qui s’apparente à de la dénonciation.

Notre communiqué de presse, notre interpellation du recteur, du préfet et des services des correspondants Police Sécurité Ecole.

Le communiqué de presse

La lettre au recteur, au préfet et au correspondant Police Sécurité Ecole

La communication de la fédération des syndicats Sud-Education

SUD éducation dénonce le non respect des règles concernant les absences pour fêtes religieuses

 

Courrier au ministre au sujet des enquêtes sur les absences des élèves à l’occasion de la fête de l’Aïd-El-Fitr

Et depuis…

Le ministère a communiqué sur le fait qu’il ne s’agit pas de fichage car pas nominatif.

Le rectorat a fait envoyer par les secrétaires de circonscription un mail pour dire que la réponse à cette enquête n’est pas obligatoire, puisque ne provenant pas du supérieur hiérarchique (mais de la police).

Rien d’autre sur le fond, rien d’autre sur le ciblage d’élèves musulmans, rien d’autre sur le ciblage des établissements. Évidemment, la macronie c’est dégueulasse, et ils assument.