Pour l’année 2 de Parcoursup, la situation s’aggrave, puisqu’elle s’inscrit dans la durée. Cette année, les très nombreux dysfonctionnements constatés ne peuvent plus être imputés au « rodage » du système. Ils lui sont en fait inhérents. L’injustice de Parcoursup est un fait à ce point admis qu’elle a intégré le scénario de la série « Plus belle la vie ». Plus belle… ou plus triste.
Le nombre de candidat.e.s, de 800 000 en 2018, est passé à 900 000, sans plan d’envergure de création de places dans l’enseignement supérieur. Cette hausse des candidatures n’est pas simplement l’effet de la démographie ou de l’attractivité des études supérieures. Il faut compter aussi avec tou-te-s les déçu-e-s de Parcoursup, édition 2018, qui candidatent cette année pour une réorientation, sans assurance de succès. En laissant sur le carreau de trop nombreux et nombreuses jeunes, Parcoursup crée une file d’attente d’étudiant-e-s cherchant désespérément à accéder à la première année de leur choix, qui risque de grossir au fil des années.
L’injonction faite aux formations du supérieur de classer tou.te.s les candidat.e.s sans ex æquo confine à l’arbitraire et à l’absurde.
Cette année encore, il y a des classes où une majorité des élèves n’ont reçu aucune réponse positive à l’ouverture de la plateforme (obtenant seulement des « en attente » ou des « non »). Rappelons qu’en 2017, avec le très décrié APB (Admission post-bac), 80 % des candidat.e.s avaient eu une réponse positive à l’ouverture des résultats ; 50 % avaient obtenu leur premier choix dès le premier jour.
Cette année encore, les remontées semblent suggérer que les élèves des zones géographiques et des filières reléguées (notamment en lycée professionnel) sont les grand.e.s perdant.e.s d’un système discriminatoire.
Cette année encore, la plateforme communique aux élèves, à un mois du baccalauréat, des rangs de classement sur les listes d’attente à 4 chiffres (1000e, 2000e…) qui n’ont aucun sens pédagogique, si ce n’est de briser et d’exclure les élèves les plus fragiles. Nous rappelons aux candidat.e.s que ces classements ne disent rien de leur niveau réel, qu’ils sont basés sur des critères opaques et peu maîtrisés compte tenu du nombre de dossiers que les formations du supérieur ont à traiter.
Cette année encore, la plateforme n’est pas opérationnelle, et empêche des candidat.e.s d’accéder à leurs réponses le jour des résultats, entre 19 h et 23 h.
Cette année encore, on observe des cas de très bons et bonnes élèves qui n’ont aucune réponse positive à l’ouverture de la plateforme : le gouvernement ne laisse même pas leur chance aux « premier-e-s de cordée » !
Cette année encore, le gouvernement compte sur le découragement et l’abandon d’un grand nombre de candidat.e.s, avec un bouton « Je démissionne de Parcoursup » bien en vue, plutôt que d’investir massivement dans l’éducation.
SUD éducation refuse toute forme de sélection, qu’elle se fasse par Parcoursup ou par l’argent, avec l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiant.e.s étranger-e-s extra-communautaires.
SUD éducation revendique un financement public à hauteur des besoins pour l’éducation, le recrutement de personnel titulaire et la création de places pour permettre l’accès de chaque candidat.e à la filière de son choix.
SUD éducation appelle les personnels, de la maternelle à l’université, à combattre l’école du tri social dans la rue le 18 mai, par la grève le 21 mai, et à mettre en débat la grève des examens.
Des « oui » sur Parcoursup qui deviennent des « en attente » : des questions demeurent, la lutte continue !
Cette année, le ministère de l’Enseignement supérieur n’a pas communiqué de « tableau de bord » des indicateurs de Parcoursup, permettant de savoir combien de candidat-e-s avaient reçu au moins une réponse positive à l’ouverture de la plateforme. Et pour cause ! Il jugeait qu’encore trop de « oui » avaient été envoyés… Le vendredi 17 mai, les candidat-e-s à 409 formations ont découvert que des « oui » qu’ils avaient reçus antérieurement s’étaient transformés en rangs sur des listes d’attente.
Que s’est-il passé ?
Selon les éléments de langage des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, diffusés à la presse, aux établissements et au psychologues de l’Éducation nationale, les équipes de Parcoursup ont constaté le 16 mai dans l’après-midi des « taux anormalement élevés de propositions d’admission » dans certaines formations. Elles ont considéré que les formations concernées avaient mal paramétré la jauge de leurs capacités d’accueil. Elles ont donc redéfini, avec les recteurs, des capacités d’accueil plus restreintes.
Des questions se posent néanmoins : ces nouvelles capacités d’accueil ont-elles été imposées aux formations concernées ? Pour SUD éducation, il n’est pas « anormal », bien au contraire, de dire « oui » à des candidat-e-s motivé-e-s pour poursuivre leurs études. La responsabilité d’ouvrir les places nécessaires incombe au gouvernement seul.
Que se passe-t-il à présent ?
Les dossiers complets des candidat-e-s à ces formations ont été bloqués, puis rétablis en fonction de leurs rangs de classement dans chacune des filières demandées. Celles et ceux qui avaient renoncé à d’autres vœux pour accepter ces faux « oui » récupèrent ces vœux et leur rang de classement initial. Le gouvernement assure que le « principe d’équité » est garanti pour tou-te-s les candidat.e.s (ne se risquant même plus à parler d’ « égalité »). Rien n’est moins sûr. Le gouvernement diffuse des paroles rassurantes mais les conséquences de ce « bug » pourraient concerner encore plus de candidat-e-s. Quand un-e candidat-e, croyant être accepté.e, a refusé d’autres formations, d’autres élèves ont pu accéder à des places dans ces dernières. Les perdent-ils également ?
Rappelons que le dispositif Parcoursup engendre beaucoup d’angoisse chez les candidat-e-s et leurs familles. Par son incompétence et ses revirements, le gouvernement ajoute de la torture à la torture. Il a fait miroiter des places à des élèves qui se sont cru-e-s sauvé-e-s, qui leur sont retirées ensuite !
Le gouvernement fait reposer sur le personnel et les élèves le poids de gérer son incompétence
Ce gouvernement qui entend imposer l’ « exemplarité » (article 1 du projet de loi pour une « école de la confiance ») se montre irresponsable. Il recommande à présent aux agent-e-s d’assurer le service après-vente de ses propres erreurs. Les directeurs de cabinet des deux ministres ont en effet expliqué : « Un accompagnement de ces élèves et de leur famille est indispensable. Votre rôle ainsi que celui des professeurs principaux est essentiel pour les rassurer (…). Il est également important de leur préciser que l’équité de traitement des candidats est garantie grâce à cette opération. »
Frédérique Vidal invoque quant à elle, dans son communiqué du 17 mai, la solidarité entre les candidat-e-s. Elle indique que la procédure d’admission « repose également sur un principe de solidarité : ce sont les candidats qui libèrent des places au fur et à mesure qu’ils acceptent ou refusent certaines propositions, ce qui permet de faire immédiatement de nouvelles propositions à d’autres. »
Ce sont les personnels de l’Éducation, qui accueillent aujourd’hui des élèves sacrifié-e-s, qui se mobilisent pour l’égalité du droit à l’éducation, qui sont exemplaires.Ce sont les candidat-e-s, qui subissent des choix politiques pris sans considération des intérêts des usager-e-s, qui sont exemplaires.
Pas le gouvernement. C’est pourquoi nous continuerons à le combattre !
Parcoursup : le cas dramatique des écoles d’infirmier-e-s (IFSI)
En 2018, le gouvernement a discrètement profité de la réforme Parcoursup pour supprimer les concours d’entrée en IFSI, c’est-à-dire dans les écoles d’infirmier-e-s, pour les remplacer par une procédure sélective d’admission par le biais de la plateforme… en 2019 seulement. Cela sans proposer d’alternative aux élèves de terminale de 2018 qui se préparaient à cette voie… Un choix cynique et inconséquent dont les conséquences dramatiques apparaissent aujourd’hui.
Avant Parcoursup, on entrait en IFSI sur concours. En 2018, en plein mois de juillet, le gouvernement a subitement supprimé ces concours et reporté d’un an les admissions, par le biais de l’édition 2019 de Parcoursup. Conséquence : les candidat-e-s de 2018 qui avaient obtenu, souvent par Parcoursup, une place dans une formation préparant à ces concours s’y sont retrouvé-e-s affecté-e-s sans concours à passer, sans possibilité de réorientation, avec une année blanche à la clé.
En 2019, ils se sont retrouvés à recommencer toute la procédure Parcoursup, et mis en concurrence avec tou-te-s les candidat-e-s en terminale en 2018, sans création de places suffisantes. Sans compter que, la barrière du concours ayant disparu, beaucoup plus d’élèves se sont orienté-e-s vers cette voie, tentant leur chance via Parcoursup. D’où un engorgement sans précédent des candidatures en IFSI, qui pose des questions sur les critères de sélection permettant de départager autant de dossiers.
Le gouvernement, une fois de plus, sacrifie des jeunes sur l’autel de ses réformes précipitées. Il transforme l’une des rares formations qui offraient encore une perspective de mobilité sociale et d’accès à des postes de fonctionnaire à des étudiant-e-s issu.e.s de classes populaires en filière ultra sélective, sans critères définis.
Disons-le tout net : notre société a besoin d’infirmier-e-s ! Alors que les hôpitaux sont surchargés et leur personnel épuisé, on prive de formation des jeunes volontaires pour embrasser ce métier au service de la collectivité.
SUD éducation exige la création dès cette année de places à hauteur, et des besoins, et des demandes, dans les IFSI.
SUD éducation appelle les personnels de la maternelle à l’université à refuser l’école du tri social et la destruction programmée des services publics en rejoignant les nombreuses mobilisations en cours dans l’éducation et ailleurs.